Agnès Dupuy
La jolie amazone prit le départ Porte de Versailles au guidon d'une 1000 GSX-R. Quelque temps après l'arrivée sur les bords de la méditerranée, elle revient sur cette course d'anthologie. "Et dire que je faisais la belle au départ! Moi qui n'avais participé à aucune course sur piste et ignorait tout des rallyes, j'allais être servie: plus de 2300 km en 6 jours avec une Suzuki confiée par LUC MOTOS, juste rodée et que je connaissais à peine. Je savais la 1000 reine de l'efficacité, mais n'avais pas la pression pour autant. Je me disais que prendre des vacances pour une virée avec 240 potes pouvait être sympa. Libérée des préparatifs de dernière minute, au milieu de toute cette foule, je pensais plus qu'à m'évader. Heure H. Le temps de voir si mon Road Book fonctionne (merci Pierre Louis Course de me l'avoir prêté), me voilà partie pour 250 km...tranquilles. Cette journée de mise en jambes me permet de prendre contact avec ma tigresse de moto, si fine et si sensible de la poignée de gaz.
Deuxième étape lundi. Levée à 6h du mat, ce n'est pas vraiment mes heures de bureau mais bon...Motivée à l'idée d'aller poser mes roues sue le circuit du Mans, j'ai un peut honte de mes sliders tous neufs. Pourtant, je me rejouis à l'idée de pouvoir exploiter l'hyper sportive dans son environnement naturel. Nous voici quarante sur la grille. Quelques tours de reconnaissance et c'est parti pour cinq tours de course. Pas facile au départ, je dois faire du slalom pour me retrouver en 10e position et approfondir le contact avec la Suzuki. Vingt spéciales sur route fermées suivront. Souvent parsemées de gravillons, de châtaignes et de feuilles mortes. Rien à voir avec les circuits aux revêtements impeccables.
Et des images qui resteront gravées à jamais, comme celles des Monts Livradois où j'ai fait pour la première fois de l'enduro avec une sportive, debout sur les repose-pieds en priant pour ne pas freiner. Des longues séances de mécanique après roulage. Sans parler de la première étape nocturne : 250 km parcourus dans le vent et la pluie. je me suis vue au départ du Paris Dakar, avec des dizaines de phares qui brillaient dans le noir, des centaines de spectateurs sur le bord des routes. Et puis les conseils des rallye mens, et tous ces kilomètres parcourus avec, dans ma roue, Fabienne Migout sur sa Ducati. Sous la pluie et la neige fondue, elle m'avait suivie sans phare suite à un problème électrique. Elle est vite devenue ma collègue, solidarité féminine oblige"...
Agnès Dupuy sera à l'arrivée du Moto Tour à Toulon, mais d'ici là d'autres péripéties l'attendent. Vous les découvrirez en la lisant dans notre prochaine rubrique moto. Agnès remercie tous les partenaires qui n'ont pas hésité à la suivre sur son premier rallye: Le concessionnaire Suzuki LUC MOTOS, Dainese Pro-shop l'équipement cuir, les casques FM, Bagster.com pour la sacoche de réservoir, l'assureur ama.fr, Pierre Louis Course(78), secdem.fr pour la bulle, le conseil Général des Yvelines et la commune de Magny-les-Hameaux(78), Llunor, Serac et tout particulièrement Tibo son fidèle assistant ainsi que Sarah de Salamandre Racing Team. Sans oublier tous les commissaires de course.
Agnès Dupuy vous à conté dans cette rubrique ses aventures aux cotés de grands champions sur la première partie du Moto Tour.
Nous l'avons quittée au terme d'une étape harassante, à la lueur des phares dans la pluie et le froid.
"Après cette nuit de folie où je n'ai dormi que 4h, je me retrouve dès le lendemain matin sur la grille du circuit d'Issoire. Sur l'avant-dernière ligne, à peine réveillée et de mauvaise humeur, j'ai le couteau entre les dents au départ de ma série. En course, je remonte les pilotes par paquets et termine cinquième. Pas mal! J'en ai d'ailleurs rayé mon silencieux pour avoir forcé le passage a quelques gars moins rapides.
Deux tours de plus et je punissais tous ceux qui m'avaient doublé durant cette nuit d'orage. Mais je dois apprendre à mettre mon attaque entre parenthèse, car je fatigue de plus en plus et il reste trois jours de course; Il va falloir gérer!
La longue étape qui suit est plus difficile.
Entre Issoire et Villefranche-sur-Saône les contrôleurs, lors d'un pointage horaire, me récupèrent de justesse. Les bras tétanisés par la fatigue et la position en appui sur les guidons étroits de la GSX-R, je n'arrive plus à doser les gaz et manque de m'étaler à l'arrêt.
Un peu plus loin, je rencontre Michel mon sauveur. Le n°187 me récupère à la nuit tombée, en pleine forêt, alors que je suis perdue sans lumière pour éclairer mon Road book. Du coup, je me laisse guider par la K1100RS qu'il pilote merveilleusement bien;
En roulant, je n'ai qu'une envie, arriver à Villefranche-sur-Saône pour prendre une douche chaude avant de m'en remettre aux Kinés d'Elite Sports et rejoindre mon assistant Tibo qui doit commencer a se poser des questions sur les raisons de sa mission.
Lui aussi commence à s'épuiser, puisqu'il suit le même rythme et les même horaires au volant de son camion.
Certaines routes empruntées sont juste assez larges pour le passage d'un side-car. Les ravitaillements d'essence sont marqués par quelques bugs suite à ses retards. Mais mon instinct féminin me sauve et je me débrouille toujours pour trouver un peu de carburant avant de tomber en panne sèche. Du coup, je continue ma route a bon rythme derrière Michel et sa BMW dans la traversée de l'Ardèche aux Cévennes.
Souvenirs inoubliables de ces paysages baignés de soleil. Le tracé est rapide mais technique. Douze kilomètres d'éclate nous attendent au Burzet pour la plus belle spéciale: la meilleure de ce Moto Tour.
Avant-dernier jour sur le circuit d'Ales que je ne connais pas. Je jubile pourtant, car à chaque fois, c'est une récompense que de pouvoir m'affirmer sur piste. Là, je peux facilement remonter dans le classement général. Je ne suis d'ailleurs pas trop mal placée à mi-parcours: dans les 80 premiers (sur 240) et la seconde fille. Mais mon but est avant tout de finir ce Moto Tour. Les chutes et les abandons se succèdent, moi je suis toujours là; J'espère gagner ma manche à Ales où ma surpuissante Suzuki devrait mieux qu'ailleurs dominer le plateau.
Mais un concurrent moins expérimenté, suite à un pari stupide, manque de m'entraîner dans sa chute et je ne termine que sixième (sur 40 tout de même).
Nous continuons en direction du Mont Ventoux pour la plus délicieuse des étapes de liaison passant par les spéciales de Saint-Estève et des montagnes de Provence. Des routes paradisiaques que je prends le temps de savourer comme on savoure un fruit mûr, discutant même avec quelques spectateurs venus nous voir passer. Les deux dernières spéciales sur routes tourmentées du Mont Faron seront des plus difficiles. Mais à l'arrivée sur la plage du Mourillon à Toulon, toute la tension retombe. J'en aurait presque piqué une tête dans la Méditerranée...s'il avait fait plus beau.
Voilà c'est fini. Je me classe cent vingt-troisième du général et sixième fille, je suis toujours restée sur mes deux roues et je me félicite encore d'avoir vécu cette grande première qui signe le retour des grands rallyes, le Tour de France Moto ayant été abandonné en 1981. Mon expérience s'est enrichie de milles émotions, de contacts humains, d'aptitudes à la conduite et à affiner les réglages. Autant de sensations que les pilotes des disciplines mettent parfois des années à accumuler".